GRENOUILLE
en résidence du 23 au 28 janvier 2023
Sortie de résidence, le vendredi 27 janvier 2023 à 19h30
pour réserver : leshumeursmassacrantes@gmail.com
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Texte et mise en scène : Charline Curtelin
Avec Mathilde Augustak
Scénographie : Marthe Lepeltier
Création sonore : Robin Emptone
Crédit photo : Amaury Cornu
Voix-Off : Olivier Debbasch
NOTE D’INTENTION ARTISTIQUE
Dans l’appartement vide de son amour, Raphaëlle s’active. Pour le moment, rien ne bouge. Myriam ne viendra plus. Cette fois-ci elle est morte et il va bien falloir en faire quelque chose. Emmurée dans son silence, Raphaëlle remarque la présence d’un autre être vivant dans la pièce : une grenouille. Commence alors une rencontre entre elle et l’animal qui se fait le réceptacle de sa douleur. Un long et doux moment de consolation s’annonce en compagnie de cet animal aux pouvoirs étonnants. Et si une brèche s’ouvrait pour Raphaëlle, une possibilité de poser les questions qui sont restées en suspens ? Après tout, il suffit peut-être de décoder les signes et d’écouter les rêves pour entendre le langage des morts.
LIGNES D’ÉCRITURE
Deuil et fantômes : déterrer les tabous, faire résonner l’indicible.
Il m’est nécessaire de parler des morts, de faire résonner les rires qui sont encore dans ma tête, les sensations qui ne m’ont pas quittée. Après avoir éprouvé le deuil de plusieurs manières, j’ai relevé une vraie faille dans la gestion des émotions qui l’accompagnent, non seulement au sein des familles, mais aussi au sein de la société. Les regards et les intonations se transforment subitement et nous nous retrouvons démuni.es face à la perte. Parler d’un mort, c’est sentir le malaise que provoquent les termes qui s’y rapportent, c’est mettre en lumière la façon dont nos morts nous poussent à inventer de nouvelles manières d’être au monde, c’est ouvrir les vannes d’un des plus grands tabous de notre siècle qui se galvanise d’hyperactivité, de surabondance et de la croyance en l’immortalité. Ce texte explore de nouvelles manières de croire et de concevoir la vie après la mort. Si Victor Hugo se livrait déjà à des expériences de spiritisme, il s’agit de déployer une parole qui relève de l’inconscient, du rituel, du sensible. Quelles sont les sensations qui habitent un corps en deuil ? Comment ce corps ressent la présence de la disparue et comment il l’active ?
De la réparation intime à la consolation collective
Grenouille est un texte qui appelle à un double mouvement : la réparation intime et la consolation collective. Par sa verve poétique et ses enjeux politiques, il aspire à un véritable mouvement de catharsis chez les spectateur.ices. Il appelle à de nouvelles formes de rituels pour réenchanter le monde, s’émerveiller à nouveau face à la catastrophe qui engloutit le réel. C’est pourquoi j’ai mené un travail de recherche autour de la façon d’honorer les morts à travers le monde pour s’opposer à une vision occidentale qui annihile cette forme de ritualisation. L’écriture est nourrie par de nombreux témoignages, des ouvrages comme Au bonheur des morts, récits de ceux qui restent de Vinciane Despret mais aussi par tout un univers cinématographique entre Marguerite Duras, Apitchapong Weerasethakul et David Lowery.
Raphaëlle : d’Antigone à la figure de la sorcière
Raphaëlle, à l’image d’Antigone est une vraie figure de lutte et de désobéissance face à la morale imposée par le deuil. Elle ne peut pas pleurer. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce personnage cartésien révèle peu à peu son pouvoir : la faculté de communiquer avec les morts. Son orientation sexuelle et ses pouvoirs font de Raphaëlle un personnage en marge. Traversée par les voix qu’elle invoquent, à l’affût des signes de l’au-delà, elle ne cesse d’aller vers la justice pour rendre hommage à Myriam. C’est aussi un personnage en proie au désespoir amoureux, à la solitude, aux doutes face à ses propres croyances et valeurs. Pour elle, le tragique flirte constamment avec la célébration, l’ironie, la fête et la rage de vivre. Son corps est sans cesse en mouvement, tout comme les émotions qui la traversent et la poussent à renverser le monde qui l’entoure. À travers Raphaëlle, il s’agit de donner à voir et à entendre l’énergie d’un monde post-mortem fantasmé qui échappe à la lassitude et à la tristesse pour faire résonner la liberté.
Site web Les Humeurs Massacrantes
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Avec le soutien du Carreau du temple, La Mac de Créteil, l’Annexe, Le Nouveau Gare au Théâtre, Anis Gras – Le Lieu de l’Autre, Les Déchargeurs, le Théâtre de Chambre / 232 U et L’association Actée.